Formation continue des enseignant·es et CPE : les résultats de l’enquête de SUD éducation

La formation est un enjeu majeur pour l’avenir du service public d’éducation. Les personnels ont besoin d’être formé·es pour accueillir les élèves en situation de handicap, les élèves allophones et les élèves en difficultés scolaires ou sociales, mais aussi pour lutter contre les violences physiques, psychologiques et sexuelles subies par les élèves et enfin pour la reconversion écologique de l’école.

Pour faire le point sur la réalité de la formation continue des personnels enseignant·es et CPE mais aussi pour connaître leurs attentes, SUD éducation a lancé une enquête en ligne du 4 au 20 octobre.

 

L'enquête en bref

L’accès à la formation des enseignant·es et des CPE est très insuffisant : parmi les personnels qui ont répondu à l’enquête de SUD éducation en 2023, 84% des personnels du 1er degré ont suivi tout au plus les 18h de formation statutaires et 59% des personnels du 2nd degré ont suivi moins de 2 jours de formation. Au contraire, dans les autres pays membres de l’OCDE les enseignant·es déclarent suivre en moyenne 8 jours de formation par an et, à titre de comparaison, le temps de formation continue est en moyenne de 7,4 jours par an dans les autres ministères.

L’enquête de SUD éducation montre que les personnels ne sont pas satisfait·es des modalités d’organisation de la formation continue : convocation au dernier moment dans le 1er degré, format visio inadapté à la formation aux gestes professionnels, des contenus qui ne correspondent pas aux attentes des personnels…

 

La formation est un droit !

Pourtant, le droit à la formation professionnelle tout au long de la vie, est prévu par le code général de la fonction publique (article L. 421-1) qui garantit aux agents publics de mobiliser les dispositifs de la formation professionnelle afin de favoriser leur développement professionnel et personnel, de faciliter leur parcours professionnel,concourir à l'égalité d'accès aux différents grades et emplois, en particulier entre femmes et hommes, et à la progression des personnes les moins qualifiées.

 

À retenir

Quelles sont les formations suivies les personnels qui ont répondu à l’enquête ? 

  • 2% des répondant·es ont suivi une formation sur l’écologie,
  • 1% sur le harcèlement sexuel et moral au travail,
  • 3% sur l’hygiène et sécurité au travail,
  • 4% sur la protection de l'enfance,
  • 6% sur l’éducation à la sexualité
  • 18% sur l’inclusion et le handicap,
  • 14% sur le harcèlement scolaire.

 

Sur quels sujets les personnels veulent-ils être formés ?

  • 45% des personnels n'ayant pas déjà été formé·es veulent suivre une formation sur l'inclusion et le handicap,
  • 40% sur le harcèlement scolaire,
  •  35% sur la protection de l'enfance,
  • 30% sur l'hygiène et la sécurité au travail,
  • 29% sur la prise en charge des élèves allophones,
  • 27% sur l'écologie,
  • 27% sur l'éducation à la sexualité,
  • 18% sur le harcèlement moral et sexuel au travail.

52% des personnels souhaitent également bénéficier d'une formation sur les pédagogies coopératives, 39% sur les contenus disciplinaires et 27% sur la gestion de classe.

 

Zoom sur le 1er degré

Les personnels du 1er degré doivent suivre 18h de formation par année scolaire. Ces formations (en partie imposées) constituent la totalité de la formation continue de 84% professeur·es des écoles.

Parmi celles et ceux qui ont la chance de pouvoir suivre des formations supplémentaires, c'est le plus souvent (68%) pour deux jours maximum.

Part de personnels du 1er degré  Volume de formation 
31 % moins de 18h
53 % uniquement 18h
16 % plus de 18h

 

Au-delà du volume annuel de la formation continue, ce sont les conditions d'organisation de ces formations qui posent problème. 43% des personnels ont reçu leur convocation au dernier moment

 

et plus de la moitié des personnels du 1er degré n’ont choisi aucune de leurs formations.

Une majorité de personnels du 1er degré a suivi des formations à distance (58%). La moitié des personnels considère que la formation à distance est moyennement adaptée. Un tiers considère que cette formation à distance n’est pas du tout adaptée.

La moitié des personnels considère que la formation continue est moyennement utile. Un tiers considère que cette formation continue ne leur a pas du tout été utile.

Enfin, comme pour l'ensemble des personnels, ce qui retient notre attention c'est la faible proportion de personnels formé·es sur des thèmes essentiels.

Seule une minorité des personnels a déjà suivi une formation sur des enjeux aussi importants que la protection de l’enfance (moins de 5%), l’éducation à la sexualité (1,5%), l’écologie (4%) ou l’hygiène et la sécurité (moins de 4%).

Alors l’inclusion des élèves en situation de handicap est une priorité nationale, moins d’un·e enseignant·e sur cinq a déjà suivi une formation sur l’inclusion.

De même, alors que la lutte contre le harcèlement fait l’objet d’un fort volontarisme ministériel, moins d’un·e enseignant·e sur sept a déjà suivi une formation sur le harcèlement scolaire.

Pourtant, les enseignant·es expriment clairement leurs souhaits : 53% souhaiteraient avoir une formation sur le harcèlement, 54% sur la protection de l’enfance, 58% sur les pédagogies alternatives…

 

Zoom sur le 2d degré (enseignant·es et CPE)

L’enquête a permis de montrer à quel point la formation continue a été réduite à peau de chagrin dans le second degré. Pourtant la formation des personnels est une nécessité !

Part de personnels du second degré Nombre de demi-journées de formation en 2022-2023
19 % Aucune
40 % Moins de 4 demi-journées
17 % entre 5 et 6 demi-journées
23 % plus de 6 demi-journées

 

SUD éducation dénonce le passage à 100% de la formation hors temps de service à la rentrée 2024. Cette décision du Ministre contrevient au droit à la formation pour tou·tes. Le métier d’enseignant·e est le seul où l’employeur contraint les agents à se former hors de leur temps de service. Il est temps que le ministère entende que lorsque les personnels ne sont pas devant les élèves : ils ne font pas rien. D’ailleurs, les récentes études du ministère montrent que la moitié des enseignant·es travaillent au moins 43 heures par semaine.
Le passage au 100% hors temps de service est particulièrement pour les personnels qui ne peuvent accroître leur temps de travail : les personnels en situation de handicap ou encore les femmes qui assurent une double journée de travail.

Part de personnels du second degré Modalité de la formation
50 % en partie sur temps de service et en partie en dehors
45,3 % uniquement sur temps de service
4,7 % hors temps de service

 

Et la visio dans le second degré ?

Dans le détail, 38% ont suivi des formations en partie en présentiel et en partie à distance, 3% uniquement en distanciel et 59% uniquement en présentiel.

Le ministère veut imposer le format visioconférence pour la formation des personnels. Pour SUD éducation le format de la visio peut être adaptée à la transmission d’informations mais pas à la formation à des gestes professionnels. La formation nécessite d’échanger et de construire ensemble. Pour SUD éducation, il faut développer la formation sur le lieu de travail dans les établissements scolaires.

 

Quelles sont les formations suivies par les personnels du second degré ? 

  • 6,2% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation écologie
  • 2% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation harcèlement sexuel et moral au travail
  • 7% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation hygiène et sécurité au travail
  • 3% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation protection de l’enfance
  • 10% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation éducation à la sexualité
  • 19% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation inclusion et handicap
  • 14% des personnels du 2nd degré ont suivi une formation harcèlement scolaire

23% des femmes déclarent avoir été victimes de harcèlement sexuel au travail, or l’enquête de SUD éducation montre que seulement 2% des personnels du second degré ont déjà assisté à une formation sur ce sujet.
De même, la lutte contre le harcèlement scolaire est une priorité du ministère. Cette année, trois jeunes se sont suicidés en raison du harcèlement qu’ils subissaient pourtant 86% des personnels ne sont pas formés sur le sujet.

 

Sur quels sujets les personnels du 2d degré souhaitent-ils être formé·es ?

Plus de la moitié des personnels souhaite recevoir une formation disciplinaire.

Plus de la moitié des personnels souhaite bénéficier de formation pédagogique et didactique pour les élèves allophones ou en situation de handicap : la formation est une part essentielle de l’école inclusive.

Les personnels aspirent à davantage de liberté pédagogique et souhaitent une formation continue plus riche qui explore les différentes démarches pédagogiques. SUD éducation revendique l’attribution de moyens aux mouvements pédagogiques afin de permettre à leurs membres d’intervenir pleinement dans la formation continue des personnels comme c’était le cas avant l’ère Blanquer.

Les programmes évoluent néanmoins les personnels ne bénéficient pas d’une formation ouverte sur la recherche disciplinaire et la didactique pour renouveler leur enseignement ou pour intégrer la lutte contre les discriminations et la reconversion écologique de la société de manière transversale dans les apprentissages. Dans certaines académies, les professeur·es de lettres ont accès à un séminaire dispensé par un maître de conférence sur les nouvelles œuvres au programme du bac par exemple. L’enseignement nécessite un haut niveau de formation nourrie par les travaux de la recherche disciplinaire et transdisciplinaire.

  • 32% des personnels souhaitent être formé·es sur le harcèlement scolaire
  • 21%  des personnels souhaitent être formé·es sur la protection de l’enfance
  • 20%  des personnels souhaitent être formé·es sur l’éducation à la sexualité
  • 26%  des personnels souhaitent être formés sur l’inclusion et handicap
  • 20%  des personnels souhaitent être formé·es sur l’écologie
  • 55%  des personnels souhaitent bénéficier de formation disciplinaire
  • 23%  des personnels souhaitent être formé·es sur la pédagogie pour les élèves allophones et FLE
  • 18%  des personnels souhaitent être formé·es sur la gestion de classe
  • 51%  des personnels souhaitent être formé·es sur les pédagogies alternatives et coopératives
  • 19 %  des personnels souhaitent être formé·es sur le harcèlement sexuel et moral
  • 23%  des personnels souhaitent être formé·es sur l’hygiène et sécurité au travail

Les souhaits de formation des personnels montrent que les personnels du 2nd degré ont besoin de davantage de formation disciplinaire didactique et théorique tout au long de leur carrière, mais qu’ils attendent également une formation pour être outillée sur tous les enjeux de l’école d’aujourd’hui : à commencer par la lutte contre les violences et les discriminations.

 

Mobilisons nous pour le droit à la formation !

Les résultats de l’enquête menée par SUD éducation montrent que la formation continue ne correspond ni aux besoins des personnels ni aux enjeux de l’école et de la société d’aujourd’hui.

Les reculs du ministère sur le droit à la formation participent avec les salaires insuffisants et la dégradation des conditions de travail à la désaffection pour les métiers de l’éducation.
SUD éducation porte la construction d’une véritable politique de formation continue pour tous les personnels.

Mobilisons nous dans les écoles et les établissements scolaires pour porter collectivement nos besoins de formation et pour imposer qu’elles se tiennent en présentiel, y compris sur le lieu de travail et surtout sur le temps de classe !

 

SUD éducation revendique : 

  • une formation sur le temps devant élèves et en présentiel, 
  • une formation choisie par les personnels, 
  • une formation ouverte aux différents mouvements pédagogiques coopératifs, 
  • une formation pour intégrer dans les enseignements la lutte contre les discriminations, des pratiques pédagogiques inclusives et la reconversion écologique de la société, 
  • une formation disciplinaire et transdisciplinaire ouverte aux apports de la recherche universitaire.